Topographie en Touraine

Date
03 mars 2012

Durée
2j

Type de sortie
Stage Scientifique
Département
Loir et Cher (41)

Massif


Commune
Thésée la Romaine

Photos







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Descriptif / Compte-rendu

Une fois n'est pas coutume, nous partons faire de la spéléo "de surface".
L'objet du week-end est d'initier les plus débutants d'entre nous à la topographie souterraine et, pour les autres, d'échanger sur leurs méthodes et expériences. Cet interclub du CDS92 qui était dans les cartons depuis près d'un an se réalise enfin.
Nous réunissons donc trois clubs du CDS92 (Terre et Eau, ASTC, et Abimes), ainsi que Daniel Chailloux (AREMIS, 94) et José (dans tellement de clubs qu'il ne sait même plus lesquels) en guest-stars et topographes éclairés.
Notre terrain de jeu, inhabituel, est une carrière de tuffeau, ancienne champignonnière convertie en cuverie, gracieusement mise à disposition par son propriétaire curieux d'en avoir enfin un plan.
Nous quittons donc la capitale vendredi soir direction la Touraine. Autre région, mais mêmes rituels : dès l'arrivée à notre centre d'accueil, les bières et drôleries diverses, victimes de la gravité, changent de contenant. C'est pour beaucoup d'entre nous l'occasion de faire connaissance et pour d'autres des retrouvailles. Tout le monde a des histoires à se raconter et il faut se faire violence pour aller mettre la viande dans le torchon, mais la journée du lendemain sera studieuse...

Samedi matin, dans la foulée du petit déjeuner, Philippe et Daniel présentent la méthodologie de la topographie : choix des stations, tenue du carnet de topographie, dessin à l'échelle à mesure de la progression dans le carnet topo. Daniel a amené feuilles millimétrées et rapporteurs topo qui s'avéreront fort efficaces sous terre. L'instrument clé de la réussite est le Disto X, lasermètre Leica modifié pour les besoins de la topographie souterraine. Pour le reste, notre matériel reste rustique : carnet topo (feuilles de saisie, papier millimétré et rapporteurs) et piges de topographie (l'une sert de mire, l'autre de support pour le Disto).
Cinq équipes de topographes sont constituées, comprenant chacune au moins un encadrant rompu à la topographie (si on considère que la tenue d'un carnet topo au stage initiateur entre dans cette catégorie...). Chaque équipe se compose de deux topographes et un dessinateur. Le topographe de tête a pour mission la recherche des points de visée (stations topographiques), et devra anticiper le développement de la cavité. L'autre topographe se charge des visées. Le dessinateur, enfin, saisit les données topographiques transmises par les topographes (distance entre deux stations, angle au nord, pente, largeurs gauche et droite, hauteur) et reproduit la topographie à l'échelle à mesure de la progression sur papier millimétré. La calibration des Disto X vérifiée, il est désormais temps d'aller sur le terrain.
Pendant que nos camarades mangent leur pique-nique dans la carrière, nous effectuons une première visite avec Daniel et Jean-Paul pour découper la carrière en secteurs à affecter à chaque équipe. Il faut dire que nous prenons notre temps, émerveillés que nous sommes par la quantité d'artefacts présents : tableaux de champignonnistes, notes de champignonnistes, graffitis anciens divers... La carrière est propre, telle qu'elle a été laissée lors de l'abandon de la production de champignons. A notre retour, les équipes qui commençaient à s'impatienter se dispersent donc sur leur terrain d'opération : nous sommes partis pour une journée de relevés topographiques.
Le parcours des galeries est effectué avec méthode, relevant toutes les bifurcations, changement de pente, galeries borgnes... Le dessin de nos zones prend forme sous nos yeux sur le carnet topo. Dès que possible, nous effectuons des bouclages dans les zones complexes : cela consiste à progresser de point en point jusqu'à revenir sur un point déjà topographié afin de faire une double vérification. Des bouclages entre équipes sont créés de même, ce qui est d'autant facile que plusieurs lucarnes percent les galeries, permettant de voir des zones topographiées par d'autres groupes. Ces mêmes bouclages permettront par la suite, avec l'aide de l'outil informatique, de détecter et tenter de corriger les erreurs de mesure.
Le travail est répétitif, mais assez addictif : à la topographie, nous mêlons aussi la découverte de la carrière. Il n'en existe en effet pas de plan connu, et nous ne connaissons pas par avance les zones à topographier.
Vers 18h, Jean-Paul bat le rappel, il ne s'agirait pas d'arriver en retard pour l'apéro. Et surtout, nous n'avons effectué que la première partie du travail, à savoir la collecte de données topographiques.

Un premier assemblage des dessins des cinq équipes est assez étonnant : à quelques erreurs près, le résultat est plutôt cohérent, et donne une vue assez réaliste du plan de la carrière. La preuve est faite qu'une bonne méthodologie, appliquée avec soin, peut permettre un travail collaboratif efficace... Il faut toutefois admettre que l'utilisation de lasermètres permet des relevés bien plus rapides et précis que les instruments traditionnels (boussole, clinomètre, topofil ou décamètre...) et n'est donc pas totalement étrangère au succès de l'opération.
La saisie des points topographiques constitue l'étape suivante. Le logiciel visual topo va nous permettre, en conjonction avec nos dessins, de détecter et corriger les plus grosses erreurs (erreurs de nommage de stations topo, erreurs de saisie...).
L'ambiance autour de l'apéro est donc, on l'aura compris, plutôt studieuse. Tant et si bien qu'après le repas (poulet aux citrons et olives), nous retournons terminer le travail un peu comme des gosses qui reviennent à un jeu interrompu... La sortie sur papier du squelette de la carrière va s'avérer utile pour repérer les erreurs de bouclage, et la génération d'un KML va nous permettre de visualiser le zonage de la carrière en photographie aérienne avec GoogleEarth : l'époque du topofil est désormais bien lointaine, la topo passe au monde numérique!
Comme bien souvent, le Bowmore et le gris de la Côte Saint Jacques aidant, on continuera à discuter tard autour de la table... Un fantôme de passage déclenchera l'alarme d'incendie, tirant de leur sommeil les trois quarts des participants et manquant de faire renverser leurs verres au quart restant. Le mystère restera entier mais ne pertubera pas pour autant la mise à l'étiage méthodique des bouteilles, qui mènera les derniers retardataires jusque tard dans la nuit.

Au petit matin - du moins pour un dimanche - , tout le monde est péniblement debout pour poursuivre la topographie. Nous tirons les leçons des erreurs de la veille et, après quelques rappels de bons usages et de méthode par Daniel, nous regagnons la carrière. Ceux qui se sont couchés le plus tard ont un peu de mal à obtenir entre deux tremblements et grognements d'estomac une visée correcte de la mire, d'autres se retrouvent même dans l'incapacité de dessiner... autant de symptômes du sevrage alcoolique : la journée va être longue. Nous nous fixons pour limite d'arrêter la topographie en milieu d'après-midi, car il faut retourner à Paris tout en évitant au mieux les embouteillages du retour de vacances. Nous revenons au soleil sous un roulement de pédale double et de picking nerveux : en face de la carrière, un groupe amateur répète du heavy metal dans son garage... Si certains en sont agacés, d'autres boiraient bien des bières dans le garage en mémoire de Dio.
Même rituel de retour au centre d'accueil : saisie des points topo et sortie du squelette sur papier. Quelques erreurs apparaissent qui devront être corrigées, mais l'ensemble est plutôt cohérent et confirme non seulement que la méthode est bonne, mais qu'elle est robuste et utilisable par des spéléos aux moyens cognitifs limités (en l'ocurrence limités par le manque de sommeil et l'ingestion irrationnelle de produits fermentés). Nous devrons recouper ultérieurement la cheminée de ventilation trouvée dans la carrière avec un relevé GPS en surface.

Après cette collecte de données, le plus lourd restera à faire : la création proprement dite du plan avec un outil de dessin vectoriel, mais c'est une autre histoire... Nous sommes déjà quelques uns à vouloir revenir poursuivre l'exploration et la topographie de cette carrière qui n'a pas encore dit son dernier mot.


Bilan du week-end :
  • 150 stations topographiques
  • 1500 mètres topographiés
  • 12 planches de topographie à exploiter pour le dessin du plan

Samuel

Participants

Yannick A. , Fabien C. , Jean-Paul C. , Sébastien G. , Philippe K. , Samuel L. , Ana L. , Delphine M. , Gaëtan P.

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