Des classiques sur le plateau d'Albion...

Date
Du 07 avril 2012 au 14 avril 2012

Durée
7j

Type de sortie
Camp
Département
Alpes de Haute Provence (04)

Massif
Plateau d'Albion

Commune
Revest du Bion

Descriptif / Compte-rendu

Samedi

Départ d'Issy-les-Moulineaux à 9 heures du matin : la route est longue vers le plateau d'Albion. Sur un coup de tête de Fabien, nous faisons un crochet par Val-Suzon pour déguster au déjeûner un rôti de porc à la moutarde.
Une route sans histoire nous fait arriver dans la soirée au gîte à Revest-du-Bion. Delphine, Philippe et Alain, arrivés dans l'après-midi, ont déjà assuré la logistique alimentaire. Jean, Loan et Philippe T se sont arrêtés en chemin pour gérer l'approvisionnement en vins du Rhône.
La météo nous force à ressortir les polaires et faire du feu dans le poêle pour chauffer le gîte. Comme il fait donc plutôt frais, il est donc délicat d'aérer le gîte et c'est là que le sort s'acharne : la fosse septique fonctionne mal et une atmosphère méphitique nous rappellera nos fonctions d'excrétion pendant toute la semaine.

Pour cette première soirée, pâtes bolognaise maison et au lit.

Dimanche

Une météo dépressionnaire nous fait subir un vent à décorner tous les cocus de la terre.
Nous nous scindons en trois Ă©quipes.
Un groupe part à l'aven Rousti. Alain et Loan y vont pour faire (un peu) de spéléo. Fabien, Yannick et moi-même pour faire de la photo souterraine. Pendant que nous tenons la pause avec des masques de luchador, un second groupe plutôt motivé équipe le début du Jean-Nouveau... à commencer par son puits d'entrée de 160 mètres! Ce second groupe est constitué de Manu, Jean et Philippe T.
Au Rousti nous sommes suréquipés en matériel photo : chargé à la magnum, des flingues de concours et la puissance de feu d'un croiseur! Pour une fois, nous avons assez de flashes et de déclencheurs radio. Pour Yannick, c'est le baptême du feu souterrain pour son appareil photo, protégé en PeliCase (chute de 6 mètres validée pour ma part au sSciantecialet Robin... matériel approuvé par Chuck Norris lui-même).
Si ce genre de petit trou ne présente pas de grand intérêt spéléologique, on y apprend beaucoup en termes de photo souterraine. Les cavités de la région sont très verticales, le Rousti sera notre seule occasion de faire de la photo.
Bilan de la journée : quelques photos souterraines valables, le Jean-Nouveau équipé jusqu'à -200 m.

Tel le village d'Astérix, tout le monde se retrouve devant une rougaille saucisses préparée par Manu.
Ce dernier nous fait déguster son fromage artisanal au lait du Jura (un petit quelque chose de Mont d'Or dans le goût), la soirée se termine au Scapa et à l'organic Bruichladdhich, Islay original par son goût non tourbé...

Lundi

Une première équipe part équiper l'aven Jacky, constituée de Philippe T, Manu et Yannick. L'équipe de déséquipement constituée de Fab, Samuel, Alain et Loan partira plus tard, afin de croiser la première équipe à la remontée.
Difficile de se motiver pour faire de la spéléo : il fait beau et on pressent que ce sera le seul beau vrai jour de beau temps de la semaine... Nous restons avec Fab à larder au soleil sur l'herbe, laissant suffisant d'avance à Loan et Alain. A vrai dire, c'est plutôt un jour idéal pour pastis/pétanque. Aller sous terre relève un peu du masochisme. Aussi, ce n'est pas désagréable de s'équiper sous le beau temps et de faire la petite marche d'approche torse nu.
Le Jacky s'ouvre en bordure de sentier, protégé par une grille, juste au dessus d'un ruisseau asséché. La configuration de la cavité est conforme à celle des trous de la région : verticale, plutôt sèche et peu concrétionnée.
Le début n'est pas forcément large et a été désobstrué avec du lourd... Les premiers puits sont confortables mais peu larges. À un palier, un malotru s'est soulagé en tête de puits et l'atmosphère ammoniaquée rappelle nos chères catacombes parisiennes. Pour ne rien arranger, c'est une tête de puits étroite et on doit se rouler dans un liquide qui n'est pas de l'eau pour descendre : nous ne sommes pas loin du refus d'obstacle! Quel qu'il soit, le coupable est de toutes façons plus bas : on lui transmettra nos amitiés. Ça bouchonne un peu plus loin, Alain et Loan en tête ont déjà rejoint l'équipe de fond qui n'a pas terminé d'équiper. Plus on descend, plus ça s'élargit, mais ça reste très sec, exception faite des inondations anthropiques. Nous rejoignons nos camarades au pied du dernier grand puits de la cavité... Un beau puits large, d'une soixantaine de mètres, qui se termine sur un colmatage d'éboulis et d'argile. Nous sommes à -170 m, mais n'irons pas plus loin : il manque quelques mètres de corde pour descendre dans la suite et toucher le fond de la cavité. Le coupable des inondations évoquées plus haut se dénonce : Manu pensait qu'en se soulageant sur un tas de gravier, la roche absorberait un peu... C'était sans compter sur la gravité, le liquide a suivi la même voie que l'eau qui a creusé la cavité... chemin aussi emprunté par les spéléos. Il va falloir réviser les bases de karsto... et passer les sous-combis à la machine dès le retour au gîte.
La remontée est sans histoire : Fabien déséquipe, nous l'attendons aux paliers où son kit est plein afin de faire le portage. Tout cela s'enchaîne d'une manière plutôt fluide et nous restons à portée pour donner le coup de main au précédent s'il peine à sortir son kit d'une tête de puits étroite.

Une fois n'est pas coutume, nous sommes dehors alors qu'il fait encore jour et pas encore trop à la bourre pour l'apéro. L'occasion de déguster les bières artisanales préparées par Manu...
La journée se termine sur un poulet aux citrons confits et olives préparé par Delphine.

Mardi

Le temps tourne à nouveau au crasseux, c'est d'ailleurs d'après la météo la pire journée de la semaine.
Si un petit groupe (Yannick, Manu, Alain) va grotter dans l'aven Joly, le reste a de fait décidé de faire relâche.
Jean, Sam, Loan, Fab et moi-même partons assurer l'avitaillement à Sault et tenter de boire un coup en terrasse. Sur ce dernier point, on retrouvera plutôt une ambiance automnale à l'abri dans le café du Progrès... Et pour peu on prendrait bien du vin chaud.

De retour au gîte, il est bientôt temps de m'attaquer à la préparation du couscous salé sucré du repas du soir, avec du collier d'agneau qui n'aura pas survécu à la tradition pascale.
Nos camarades sont rentrés du Joly, un peu déçus de ne pas avoir pu aller aussi loin qu'ils le souhaitaient, l'équipement s'étant avéré plus long que prévu.

Mercredi

Fabien, terrassé par une overdose de légumes la veille au soir, laisse son transit lui dicter de rester polluer en surface. Il faut dire que le bonhomme a plutôt rodé son organisme à la charcuterie et aux patates : 5 fruits et légumes par jour ne conviennent pas forcément à tout le monde.
Nous avons choisi cette journée pour faire la pointe au Jean-Nouveau. Une équipe de gens plutôt matinaux (Philippe T et K, Yannick) part terminer l'équipement. L'autre équipe commencera le déséquipement (Jean, Sam, Manu), accompagnée d'une équipe qui ne fera qu'une petite pointe avant de remonter (Alain et Loan). Nous partons donc trois bonnes heures après l'équipe de pointe.
Le terrain est détrempé, la voiture patine dans des sillons de boue liquide... et il a neigé dans la nuit sur le Mont Ventoux...
L'entrée du Jean-Nouveau ne paie pas de mine : un petit gouffre comme on en voit tant... qui pourrait imaginer qu'il cote près de -600 m! Jean m'a tellement vendu le P160 comme quelque chose de tellement impressionnant que j'en suis déçu : quasiment toute la progression se fait contre paroi. L'équipement est confortable, sur broches, les fractionnements ergonomiques et bien répartis : on compte en plus des fractionnements imposés par le profil du puits des fractionnements de confort qui permettent d'accélérer la progression en groupe. Il n'empêche qu'au pied du puits, les descendeurs sont brûlants... J'économise l'usage de la dudule car il ne sera pas facile de trouver de l'eau. Après le P160, un petit passage à quatre pattes mène à la suite. Pour faire bref, cette cavité est presque exclusivement une succession de ressauts et de puits. Nous semons régulièrement des bouteilles d'eau que nos camarades utiliserons à la remontée. À chaque tête de puits, ces derniers ont laissé la cote et l'heure de passage : ils ont et conservent une bonne avance. Nous finissons par les croiser vers -400 m au début du passage précédent le méandre qui mène au Puits de l'Araignée. Par rapport à la dernière visite de Manu, ce puits a été fractionné, au grand dam des amateurs de sensations fortes (anciennement, 90 mètres plein vide, d'où le nom donné au puits) mais aussi pour le confort des spéléos. Passé ce puits, la configuration du gouffre change et devient plus humide et concrétionnée. Plus on descend, plus c'est joli. Ça goutte de partout et on se sent vraiment pénétrer au coeur de la Terre.
Un peu plus bas que la salle des perles (joliment pavée de gours remplis de perles de cavernes), nous atteignons le terminus de nos camarades... personne n'est particulièrement motivé à se baigner pour équiper les quelques mètres qui nous séparent du fond de la cavité. Nous décidons de remonter. Je vais vous la faire court, parce que remonter près de 600 mètres sur corde, c'est assez monotone, d'autant plus que le Jean-Nouveau ne présente pas vraiment de passages délicats. Les endroits potentiellement difficiles ou dangereux sont équipés de plate-formes qui bien qu'anciennes, inspirent encore confiance. Nous progressons donc doucement, mais sûrement, en nous gavant d'eau comme si c'était de la bière pour garder notre efficacité musculaire, grignotant nos barres énergétiques après les grands puits. A -300 m, nos sandwiches parfumés au basilic sont comme un repas de princes. Nous portons les kits que Manu a rempli en déséquipant. Celui-ci arrêtera de déséquiper à la Salle du 14 juillet, au-delà on se retrouverait en effet avec plus d'un kit par personne et il reste encore 260 mètres à remonter : c'est assez pour aujourd'hui. Nous terminons donc la remontée avec un kit d'équipement par personne (mention spéciale pour Jean, qui porte le parpaing de cordes gorgées d'eau du fond de la cavité). Pour ma part, c'est la première fois que je remonte 600 mètres sur corde et je mesure mes efforts. Je comprends aussi enfin et dans la douleur tout le mal que l'on disait de mon modèle de baudrier : les sangles des cuisses, trop larges, me font brûler une inutile énergie lors de l'extension. Dans la lignée, le torse passe son temps à se desserrer... pour finalement casser sa lanière pendant une remontée. Une réparation avec une dyneema me permettra de poursuivre. Enfin nous arrivons au pied du P160. La remontée est fluide sans trop d'attente : nous avons un fractionnement entre nous et cet écart se maintient sur toute la remontée. Depuis la tête du P160 on voit les étoiles. Sortie à 23h30, temps passé sous terre : 10 heures. Finalement, remonter 600 mètres avec un kit au cul, ça se fait, du moment que l'on sait doser son effort.

Revenus au gîte, tout le monde est déjà couché... mais Alain qui dort d'un sommeil léger quand ses camarades sont encore sous terre nous rejoint dans la cuisine où nous faisons réchauffer la sauce Galli qui accompagnera nos pâtes. Nous mangeons avec une bonne faim, dévorons un Banon et vidons notre comptant de vin et de whisky avant d'aller nous coucher...
Avec le recul, il sera intéressant de retourner au Jean-Nouveau pour prendre des photos du P160 avec des équipiers munis de flash à chaque fractionnement : 160 m éclairés avec des bonhommes gros comme des fourmis, ça aura de quoi marquer l'imagination.

Jeudi

Comme ils aiment porter des kits et faire les brutes épaisses, Fabien et Alain partent dans la matinée finir le déséquipement du Jean-Nouveau.
Le reste de l'équipe part faire du tourisme, pour certains visiter les charmants villages perchés de la région (Banon, Montbrun les bains...).
Les mollets de Delphine en vélo excitent la convoitise des clébards locaux. Manu serre les dents de douleur avec des cailloux dans les reins mais tiendra à acheter son stock de Banons une fois retapé. Une journée à thématique médicale, en somme...

Un poulet au vinaigre, préparé de mémoire réunira la tribu autour de la table.
Manu, chaud comme une baraque à frites, veut descendre dans le Caladaïre le lendemain matin, affronter son impressionnant P90 plein vide. Ça tient probablement au fait que la bouteille de Macallan achetée dans la journée est déjà vide...

Vendredi

Jean nous quitte pour faire un petit crochet en Bourgogne, jouer au billard français et boire des coups.
Une petite équipe (Manu, Fab, Alain, Loan, Philippe T et votre humble narrateur) se motive pour visiter une dernière cavité : la perte du Calavon. Le temps est incertain, mais les prévisions de météo France ne nous donnent pas de raisons de nous inquiéter. J'explique sur la route à Loan que la dernière cavité d'un camp peut être LA cavité du fait-divers : à trop vouloir profiter d'une dernière journée de spéléo on peut en venir à oublier toute prudence...
Le ruisseau décrit comme asséché dans la littérature crache ses 6l/min alors qu'il ne pleut pas : le temps maussade de la semaine a suffisamment alimenté son bassin versant pour le remettre à flots.
Nous tenons brièvement conseil et la prudence nous dicte de rester en surface. La suite nous donnera raison : il pleuvra dru une bonne partie de la journée, nous contraignant à rester oisifs dans le gîte. Nous tuons l'ennui, qui dans la lecture, qui en regardant un film, qui en dessinant ou pour les plus extrêmes, en dormant. A l'heure où les lions vont boire (l'heure de l'apéro, quoi), la pluie faisant une trêve, nous partons nettoyer notre kilomètre de cordes dans le Toulourenc, à une quinzaine de kilomètres du gîte : il faut aller chercher l'eau loin, en région karstique. Le plateau d'Albion est, on l'a déjà dit, extrêmement aride... mais en tous cas moins que le local à matériel où l'on aurait dû faire cette corvée une fois rentrés sur Paris si personne ne s'était motivé.

Loan reste sur place pour pouvoir nous gratifier à notre retour d'un excellent poulet au saté accompagné de nouilles de riz. Alain a gardé le meilleur pour la fin : des vins du Jura en apéritif et en digestif.
Comme il ne reste plus de whisky, il faut se rabattre sur du bizarre. L'aquavit pique un peu au premier verre, au second on commence à comprendre quelques mots de ce qui est écrit en norvégien sur la bouteille... et au troisième verre, on est parfaitement bilingue.


Samuel

Participants

Yannick A. , Emmanuel C. , Jean C. , Fabien C. , Thi Bich Loan D. , Alain G. , Philippe K. , Samuel L. , Delphine M. , Philippe T.

Commentaires

Pas de commentaires